Mission Style

Post précédant : La vie n'est pas une compétition

Croix cloche Photo par Anthony Delanoix sur Unsplash

Bien des choses se sont produites depuis mon dernier article, dont la fin de ma maîtrise et le début d’un PhD en missiologie. J’ai beaucoup à dire au sujet des dernières années, mais pour commencer je veux donner un survol de mon projet doctoral, duquel j’ai tiré un nouveau nom à ce blogue. Grosso modo, j’explore une vision renouvelée de la mission chrétienne pour s’adapter à notre société contemporaine. Il s’intitule, « Le style de vie: Clé pour une missiologie contextuelle post-moderne ».

Nous nous trouvons affrontés par une crise d’implication communautaire qui cause deux difficultés dans la mission : il est de plus en plus difficile d’attirer l’intérêt des non-croyants, et il est de plus en plus difficile de mobiliser les croyants, soit comme missionnaires vocationnels, soit comme bénévoles. Il me semble que cette difficulté renvoie à notre proposition missionnaire. Pour les non-croyants, nous voulons qu’ils se joignent à une institution, et pour les croyants, nous voulons qu’ils bâtissent une institution. Cependant, comme vous le savez sans doute, notre société ne fait plus confiance aux institutions, qu’elles s’agissent de gouvernements, d’églises, de ministères ou d’entreprises.

Ceci n’est pas d’une situation temporaire, conséquence d’une vague de scandales chez les dirigeants des églises, ni d’une hausse marquée de corruption gouvernementale. Les deux existent depuis toujours. Il s’agit d’un plus grand déplacement culturel. C’est une facette de la transition de la modernité à la post-modernité.

Le terme « post-moderne » peut déclencher des signaux d’alarme dans l’Église. Nous le voyons souvent comme une force qui lutte contre la foi chrétienne traditionnelle. Mais ce n’est peut-être pas la façon la plus utile de comprendre la post-modernité. Une véritable interaction missionnaire avec la post-modernité ne doit pas la considérer comme ennemi, mais comme culture.

Comme toute culture, la post-modernité a des avantages et des inconvénients : des valeurs qui vont dans le sens de l’Évangile et d’autres qui le contredisent. Ce qui complique la tâche missionnaire, c’est que les façons dont la post-modernité s’aligne et entre en conflit avec notre foi sont très différentes de ce qu’on a connu dans la culture de la modernité. Ainsi, de la même manière que nous contextualisons notre prédication et notre pratique lorsque nous allons dans un autre pays en tant que missionnaires, nous devrions réfléchir en profondeur à comment adopter la même posture missionnaire relatif à la culture post-moderne.

Si nous regardons l’histoire récente de l’Occident, ce contraste apparaît très clairement. Ce à quoi ressemblait la « religion » dans la modernité s’accordait avec le christianisme en grande partie selon la valeur accordée aux institutions et aux croyances. Celles-ci sont une partie de ce qu’est le christianisme, mais la lentille moderne les a magnifiées pour en faire ce dont le christianisme était principalement question. Les manifestations post-modernes du religieux sont très différentes, et s’harmonisent avec et confrontent différents éléments du christianisme. Les formes institutionnelles de l’Église et du ministère sont particulièrement difficiles à accepter, car la foi s’individualise et nos identités se construisent désormais sur l’appartenance à de multiples réseaux plutôt qu’à des communautés uniques et fortes.

Mais d’autres éléments de la postmodernité correspondent au christianisme. Deux des plus forts sont les formes d’expérience et de style de vie. Ainsi, lorsque nous examinons notre proposition missionnaire, à la fois pour les non-chrétiens et pour les chrétiens que nous aimerions inviter à la mission, nous devons réaliser que ce que nous avons traditionnellement considéré comme étant la mission est en grande partie basé sur une compréhension moderne de la foi - une compréhension axée sur les événements, les institutions et les énoncés de croyances propositionnelles. (Notez que cela ne vise pas à dénigrer l’Église ou nos doctrines, qui restent toutes deux nécessaires).

Mais que se passe-t-il si nous repensons notre point d’entrée ? Si nous repensions notre mission en fonction d’un style de vie? Lorsque notre proposition aux non-chrétiens consiste à se joindre à une institution, et notre proposition aux chrétiens à construire une institution, nous devons franchir le mur de leur aversion culturelle pour les institutions. Mais si nous changeons notre invitation pour quelque chose qui s’harmonise avec leur vision du monde, nous éliminons une grande source de friction.

Pour aborder la question de bibliquement, un disciple n’est pas quelqu’un qui appartient à un organisme, ni quelqu’un qui peut réciter une déclaration de foi. Un disciple est quelqu’un qui vit comme son maître. Qui émule son mode de vie. Et si nous repensions notre appel à une vie missionnaires et à une vie de disciple en tant que l’intégration des manières christiques d’être dans un mode de vie holiste qui reflète le Royaume de Dieu ?

Mon hypothèse est la suivante : ce faire, c’est-à-dire de procéder d’une manière qui résonne avec la culture actuelle plutôt qu’une qui s’inspirer de la culture passée, nous créerons ainsi une vocation chrétienne et missionnaire beaucoup plus attrayante, autant pour les non-chrétiens que pour les chrétiens.

Le projet comporte deux volets : le volet théorique ou théologique, et le volet pratique. Du côté théorique, je veux relire l’enseignement de Jésus sur le Royaume de Dieu à travers la lentille d’un « style de vie » et poser les questions suivantes : « Pouvons-nous dire que le Royaume a un style ? Pouvons-nous dire que la vie dans le Royaume est un style de vie ? »

Sur le plan pratique, nous allons ensuite esquisser ce à quoi pourrait ressembler un style de vie en tant que disciple-missionnaire, et emmener cette ideé sur le terrain pour tester si cela rejoint les chrétiens et les non-chrétiens de notre contexte. Pour ce faire, nous utiliserons une méthode appelée la recherche-action. L’idée est de partir d’une pratique existante pour aboutir à une pratique renouvelée, à travers une série d’itérations. C’est comme une spirale où chaque itération comprend des phases de réflexion, de clarification du problème et du contexte, de planification des interventions, d’action et d’observation, puis d’évaluation et de prise de décision.

L’étape actuelle consiste à trouver le lieu de terrain pour effectuer la partie pratique de la recherche. Plus à venir…

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