Le modèle du monde actuel : L'âge de l'autenticité selon Charles Taylor (1ère partie)
Post précédant : Le modèle du monde actuel : la sexualitéJ’ai fait référence à quelques reprises à la pensée de Charles Taylor, philosophe montréalais, et expert en sécularisation. J’ai pris ces idées du livre How (Not) To Be Secular, Reading Charles Taylor de James K. A. Smith (Eerdmans, 2014).
La pensée de Taylor est pleine d’observations pénétrante concernant notre société actuelle, et je voulais en partager quelques unes sous le thème du modèle du monde actuel. Je résume le chapitre 4 du livre de Smith, surtout les pages 84 à 90.
Selon Taylor, nous vivons maintenant dans un « âge d’authenticité ». On est arrivé ici d’un point de départ, un « ancien régime », où notre identité religieuse était très reliée à notre communauté locale. On a passé par un « âge de mobilisation », qui croyait, grosso modo, que pour expérimenter la présence de Dieu, il fallait construire une société qui suivait ses préceptes et vivait selon son modèle, car il n’était pas présent, de façon directe, dans la création.
L’âge de l’authenticité qui l’a supplanté est caractérisé par « l’imaginaire sociale de l’individualisme expressif ». C’est à dire que chacun cherche à vivre son expérience humaine de sa propre façon, et d’éviter de se conformer à un modèle imposé de l’extérieur.
« Alors la valeur primaire – même la seule valeur – dans un tel monde est le choix. »
L’individualisme expressif crée ensuite une société où nous cherchons à montrer au monde autour de nous notre individualité par un étalage mutuel, dont la mode est l’expression la plus claire. Notez bien que Taylor écrivait ceci un peu avant l’ère des réseaux sociaux, qui sont fondé sur ce même étalage, alors l’interprétation de Taylor explique très bien pourquoi on aime tant partager nos selfies, nos photos de voyages, et des trucs qu’on a bricolé en fin de semaine.
Ce milieu est très vulnérable à l’influence du consumérisme, où les compagnies incitent les consommateurs à lier leur identité à une marque ou un produit. Taylor donne l’exemple ironique de l’ado qui demande à sa mère de payer 150$ pour un skateboard blasonné d’emblèmes anarchistes, mais une décennie plus tard nous pouvons voyer ce thème très clairement dans les choix de téléphone intelligent et d’écouteurs que nous traînons partout.
Ça va jusqu’à quel point? Taylor suggère que,
« pour plusieurs jeunes d’aujourd’hui, les styles qu’ils aiment et qu’ils affichent … qui sont définis dans les médias, en relation à des personnages publics, ou même par des produits, occupent une place grandissante dans leur sens de soi. Ceci a commencé à déplacé l’importance du sens d’appartenance aux groupes de grande échelle, comme les nations, sans parler des églises, des partis politiques, etc. »
Si, de nos jours, les jeunes définissent leur identité plus selon leurs choix de gadget, de jeu vidéo, et de d’autres produits innombrables, que selon leurs communautés ou leurs croyances, nous pouvons commencer à voir pourquoi tant de jeunes perdent l’église de vue, et ainsi s’éloignent de Dieu aussi.
Alors comment pouvons-nous aider nos membres à développer une identité plus relié à leur église et leur croyances? Je pense que ça commence en leur montrant une vrai communauté. Dans mon prochain post, on regardera quelques effets concrets du déplacement identitaire et comment nous pouvons y répondre de façon contextuelle.